Quelque part, au fond de l’océan, vivait le Petit Poisson rouge. On l’appelait ainsi car il était tellement, tellement timide qu’il rougissait à tout moment, qu’il était rouge tout le temps.
Un matin, la maman du Petit Poisson rouge lui dit :
— Va voir ta Mère-Grand qui est malade et apporte-lui ce panier rempli de crevettes ; elle les mangera.
Et le Petit Poisson rouge partit, emportant le panier.
À peine le Petit Poisson rouge avait-il commencé le voyage qu’il rencontra Compère Requin :
— Bonjour, Petit Poisson rouge, où vas-tu comme ça ?
— Bonjour, Compère Requin, je vais voir ma Mère-Grand qui est malade.
Compère Requin aurait bien croqué le Petit Poisson rouge mais des poissons-scies travaillaient par ici. Alors Compère Requin essaya d’être malin.
Compère Requin s’exclama :
— Allons tous deux voir ta Mère-Grand, mais prenons un chemin différent.
— D’accord, répondit le Petit Poisson rouge. Mère-Grand habite au-delà du galion, à côté du premier rocher marron.
Le Petit Poisson rouge suivit le chemin le plus long. Il poursuivit les bancs de tout petits poissons et nageait lentement, pour admirer les algues virevoltantes.
Compère Requin prit le chemin le plus court. Nageant à toute vitesse, il dépassa le galion et arriva le premier devant la maison de Mère-Grand.
Compère Requin frappa de toutes ses forces à la porte de Mère-Grand.
La porte s’ouvrit et Compère Requin se précipita à l’intérieur.
Chez Mère-Grand, tout était noir : pas de fenêtre, pas de lumière. Rien. Rien à manger.
Compère Requin se demandait :
« Mais où est donc cette vieille mémé ? Je voudrais tant la CROQUER. »
À son tour, le Petit Poisson rouge arriva devant la maison. Il frappa timidement à la porte qui s’ouvrit.
Puis le Petit Poisson rouge pénétra chez sa Mère-Grand malade.
Compère Requin était très ennuyé.
Quant au Petit Poisson rouge, il sortit les crevettes de son panier.
On entendit Mère-Grand les manger.
GRAOUMF ! GRAOUMF ! GRAOUMF !
Elle allait mieux, elle se régalait.
Grâce aux crevettes, Mère-Grand n’était plus rouge de fièvre !
Elle avait repris sa jolie couleur de baleine bleue !
Elle sauta hors de l’eau avec le Petit Poisson rouge qui n’était pas un poisson, sapristi ! mais un baleineau… rouge de timidité !
Et Compère Requin ? Personne ne le revit. Mère-Grand l’avait avalé tellement elle avait d’appétit.
Éric Battut
Le petit poisson rouge
Paris, L’élan vert, 2012