Alija et son chien

 
Dans l’ancienne Yougoslavie, Alija, un jeune garçon victime de nettoyage ethnique, adoptera un jeune chien. Ce chien deviendra sa seule famille.

 

Je ne vais plus à l’école. Plus personne n’y va.
L’école a fermé lorsque M. Gladovic s’est enrôlé dans l’armée. Grand-maman Mirsa et ma petite sœur Tima aussi sont parties. J
e travaille maintenant avec mon papa. Mon père est le meilleur boulanger du village. Le seul, en fait.
 
Liztar se trouve sur la route derrière la côte. C’était jadis un village tranquille. Personne n’osait emprunter les étroites routes de terre qui zigzaguent à travers nos montagnes.
« Trop de nids de poule, disait mon père, des nids de poule tellement gros qu’une voiture pourrait s’y engloutir. »

Mais depuis quelque temps, des camions, des voitures et des charrettes traversent notre village. Et aussi, des gens à pied, chargés de valises, de sacs et de paquets. Des enfants en pleurs marchent seuls derrière, comme des choses sans valeur laissées à la merci du vent. Les femmes sont maigres et ont l’œil hagard. Les hommes ont des airs de chien battu.
Il y a aussi des orphelins et des personnes âgées dont le cœur et les jambes semblent lourds de fatigue. La peur est palpable, elle leur colle tous à la peau comme la boue après la fonte des neiges.

Quelquefois, ces gens s’arrêtent un peu derrière l’église. C’est là où j’apporte le pain.
« Il faut aider ceux qui n’ont plus la force de s’aider eux-mêmes », disait mon père.